L’actualité du début de l’année 2013 concernant les droits des personnes LGBT est dominée par les débats sur les textes de lois ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe.Aujourd’hui en France, la gauche cumule les pouvoirs exécutif et législatif. Pourtant, le gouvernement a beaucoup traîné avant de mettre ces textes à l’ordre du jour du Parlement. D’hésitations en atermoiements, sa gestion de cette période aura été calamiteuse. Et pendant ce temps, déjà bien avant l’élection présidentielle, car des mouvements catholiques avaient senti le vent tourner en défaveur de leurs positions, les opposants au mariage des homosexuelLEs se mobilisaient et leur homophobie se déchaînait. Que n’avons-nous pas entendu, subi jusqu’ici ! Nous ne croyons pas que la loi sur le mariage et l’adoption supprimera les LGBTphobies. Celles-ci n’ont pas disparu dans les nombreux pays d’Europe où une législation comparable existe. C’est ainsi que l’opposition conservatrice espagnole avait fait savoir, à la veille d’élections promettant une alternance, qu’elle supprimerait la possibilité pour les homosexuelLEs de se marier. Ainsi également des meurtres homophobes survenus récemment ont-ils surpris et endeuillé l’opinion en Belgique. Toutefois, le fait que les homosexuelLEs puissent se marier et adopter des enfants aura une portée symbolique : cela légitimera socialement les amours et les couples homosexuels au même titre que les amours et les couples hétérosexuels. Cela apportera également une protection juridique à des couples homosexuels et à leurs enfants. Les opposants au mariage ne s’y sont d’ailleurs pas trompés : cette reconnaissance sociale de l’homosexualité leur est insupportable, car ils défendent un seul modèle familial : celui d’un homme et d’une femme (cisgenres), unis par les liens du mariage, ayant des relations sexuelles pour « faire » des enfants. Mais ce modèle ne correspond pas à ce que vivent une grande partie des habitantEs de notre République, et ne s’inscrit pas dans les nombreuses dispositions légales de la réalité des familles d’aujourd’hui, même hétérosexuelles : familles monoparentales ou divorcées et recomposées, la possibilité pour les personnes célibataires d’adopter, l’accouchement sous X, la procréation médicalement assistée pour les couples mariés, le mariage des personnes pourtant stériles… Nous ne voulons pas d’un modèle unique et contrairement à nos opposants, ce qui nous en distingue radicalement, nous sommes du côté du choix. Nous n’oublions pas l’héritage féministe de nos luttes LGBT et tout le combat antipatriarcal pour faire évoluer le mariage vers l’égalité entre les époux. Nous n’oublions pas non plus que nos luttes se sont construites sur la liberté sexuelle et parfois sur le refus du mariage. Nous voulons le mariage comme choix, pas comme norme.
Les luttes portées par les homos bénéficient en fait souvent aux hétéros (qui sont satisfaits du pacs par exemple) ou font voir les besoins législatifs utiles à touTEs (statut du beau-parent par exemple). L’ouverture du mariage aux couples de même sexe donnera des droits aux homos mais ne prendra rien aux hétéros, sauf à ceux/celles qui veulent se croire représentantEs d’un « ordre symbolique » qu’il faut bien appeler par son nom : l’hétérocratie.
Soyons sûrEs que les homos seront assez mûrEs pour divorcer aussi après s’être mariéEs.
Nous vivons des difficultés, le chômage et la précarité comme le reste de la population et nous attendons de la gauche qu’elle prenne les mesures permettant l’amélioration de la vie et des conditions économiques de touTEs : l’accès aux soins et à la santé, la défense des droits des ÉtrangerEs vivant dans notre pays par exemple. De nombreux droits manqueront encore, après le mariage et l’adoption, aux personnes LGBT. Pourquoi d’ailleurs ne pas supprimer la mention de sexe à l’État civil ? Cela permettrait de lutter contre la binarité de sexe et de genre et simplifierait la vie et de nombreuses démarches de personnes intersexes ou trans.